Maiar - partie 1.2, à propos des amplificateurs classe B...

Publié le par Mayar

Saroumane, premier des Istari, dont Gandalf dit : « C'est le chef de l'ordre auquel j'appartiens, et c'est lui qui dirige le Conseil. Sa science est profonde, mais son orgueil a grandi avec elle, et il supporte mal l'ingérence des autres.  »

Saroumane, premier des Istari, dont Gandalf dit : « C'est le chef de l'ordre auquel j'appartiens, et c'est lui qui dirige le Conseil. Sa science est profonde, mais son orgueil a grandi avec elle, et il supporte mal l'ingérence des autres. »

Conception et réalisation d'un ampli 5 canaux classe AB
  1. Dimensionnement
    1. Cadre général : puissance de sortie, courant de sortie, sensibilité, impédance.
    2. Puissance dissipée et tension d'alimentation : formulaire classe B
    3. Puissance dissipée et tension d'alimentation : formulaire classe AB
    4. Gabarit pour la tension d'alimentation, répartition de la marge, impédances parasites
    5. Schéma de base et paramêtres d'un ampli op (article à venir...)

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Dans le dimensionnement d’un ampli, un point majeur est de rester dans sa zone de fonctionnement sûre (SOA - safe operating area). Un avantage certain des circuits intégrés audio est qu’ils comportent nativement diverses protections. Ca simplifie grandement la vie, et le sujet se réduit en gros à l’étude de la puissance dissipée par le circuit, qui se translate en contraintes sur la tension d’alimentation (gabarit).

Commençons par fixer un peu la notation, et les grandeurs de base pour les deux types de signal de sortie qui vont nous intéresser ici : sinus et carré.

  • Pour une sortie sinusoïdale injectée dans une charge complexe Z=|Z|.e :
    • on note la phase θ = 2π.f.t où f est la fréquence du sinus, et t le temps.
    • tension instantanée en sortie Vs(t) = Vsp.sin(2π.f.t) où Vsp est la tension crête (peak)
      courant instantané en sortie I(θ)= Vs(θ)/Z = Isp.sin(2π.f.t-ϕ) avec Isp=Vsp/|Z|
    • tension efficace en sortie Vseff = √[ 1/2π . 0 Vs(θ)².dθ ] = Vsp /√2
    • puissance -active- en sortie Ps = 1/2π . 0 Vs.Is.dθ = Vseff².cosϕ/|Z| = Vsp².cosϕ/2|Z|
      puissance apparente Psapparent = 1/2.Vsp.Isp > Ps
    • courant redressé moyen (mean straight)
      Isms = 1/2π . 0 |Is|.dθ = 1/π . 0π Is.dθ
      Isms = 2/π.Isp = 2/π.Vsp/|Z| = √8/π.Vseff/|Z| = √8/π.√(Ps/|Z|/cosϕ)
  • Pour une sortie un signal carré injectée dans une charge résistive R :
    • On omet ici les temps non nuls de montée/descente, et le fait qu'on travaille en bande limitée dans la vraie vie.
    • tension instantanée en sortie Vs(t) = Vsp.signe(sin(2π.f.t)), Vs(θ)=Vsp.signe(sinθ)
      courant instantanée en sortie Is(θ) = Isp.signe(sin(2π.f.t)) = Vs(θ)/R
    • égalité des valeurs crête, efficace, et redressée moyenne
      Vseff = Vsp = Vsms, Iseff = Isp = Isms
    • puissance en sortie Ps = Vseff.Iseff
Principe et schéma-type de l'amplificateur classe B push-pull
Principe de l'amplificateur classe B push-pull

Revenons a nos moutonsss, comme dirait Topaze (c) Pagnol.

Dans un ampli classe B push-pull idéal, chaque rail d'alimentation Vdd et Vss=-Vdd délivre alternativement la puissance nécessaire pour chaque portion positive ou négative du signal (ici un sinus).

En vrai, et comme indiqué subtilement sur la figure, le petit souci de rien du tout, c'est de recoller parfaitement les morceaux. Pour plus de détails a ce sujet, cf. wikipédia et articles consorts, qui en parlent abondamment, ainsi que du rendement théorique maxi comparé au classe A.
Nous, nous allons explorer des sentiers moins battus et pourtant utiles au dimensionnement d'un ampli...

D'abord un truc facile et universel. Afin qu'il n'y ait pas de distorsion, la tension d'alimentation ne peut être inférieure à la tension crête du signal de sortie : Vddmin,B = Vsp

Ensuite, merci au théorème de Boucherot, la puissance totale délivrée à l'ampli est la somme des puissances délivrées par chaque rail :
PtotalB = 1/2π ∫θ/Is(θ)>0Vdd.Is(θ) + 1/2π∫θ/Is(θ)<0(-Vdd).Is(θ)dθ = Vdd.1/2π∫ϕ2π+ϕ|Is|.dθ
PtotalBVdd.Isms
Théorème de Boucherot encore, la puissance dissipée au passage par l'ampli est tout simplement ce qui n’est pas délivré à l’enceinte :
PdissB = PtotalB - Ps =  Vdd .Isms - Ps

Tiens, on peut jouer à renverser cette formule pour exprimer Vdd=f(Pdiss) en fonction de la puissance dissipée :
Vdd = (Ps+Pdiss)/Isms
Meuuuuh... Pourquoaaa cette idée tordue? Baaah, c'te question... Il y a un maximum absolu Pdissabs que le circuit audio est capable de dissiper sans faire bzzttt-ploc voire psshiiiit!!! Soit il est donné en dur dans la datasheet, soit il résulte des limites de dissipation thermique dans la mise en oeuvre du circuit. 

Classe B... sur signal sinus

La tension mini absolue du type de circuit audio considéré est de ±10V. Le circuit est peut-être fonctionnel dans ces conditions, mais la sortie sera pourrie! Nous allons avoir besoin d'un critère plus réaliste, tout en étant conscient qu'il pourra être -un peu- emplafonné. En l'occurrence, l'alim minimum pour un sinus :  
Vddmin,B,sin = √2.Vseff

On décline aussi la puissance dissipée par l'ampli, en fonction de la puissance de sortie sur charge résistive, qui nous servira à corréler nos formules avec les courbes dans les datasheet. 
PdissB,sin = √8/π . Vdd . √(Ps/R) - Ps
La forme générale de la courbe est une cloche. Son maximum n'est pas au maximum de la puissance de sortie! Ce maxi peut être calculé au besoin via ∂Pdiss/∂Ps = 0, ce qu'on fera plus loin.

Restons un instant sur la formulation de la puissance dissipée par l'ampli sur sortie sinus...
D'un côté, on cherche à produit un niveau sonore, piloté par la tension efficace Vseff.
De l'autre, un ampli classe B pilote une enceinte via une tension de sortie instantanée limitée par la tension d'alimentation, et dans ce cas l'angle d'attaque est pour une tension Vsp donnée. Boaf, autant sortir les deux expressions 😁
PdissB,sin = ksin.Vsp/√2.Vdd/|Z| - Vsp²/2 . cosϕ/|Z| = (ksin.Vdd - Vseff.cosϕ).Vseff/|Z|
avec ksin = √8/π

On obtient une courbe parabolique fonction de Vseff.

Bouclons ce p'tit exercice en calculant le maxi absolu de tension d'alim quand le signal de sortie est un sinus :
Vddabs,B,sin = (Vseff.cosϕ + Pdissabs.|Z|/Vseff)/ksin

Bon alors, dans la vraie vie, une enceinte un tant soit peu compensée (ahem...) :

  • aura une impédance minimale pas trop loin de son impédance nominale
  • présentera une phase électrique variant de grand max ±45° autour de 0° <=> cosϕ < √2/2.
    Dans les zones où la phase s'éloigne fortement de 0, le module de l'impédance remonte normalement au moins en proportion. L'ampli se retrouve à dissiper une puissance supplémentaire pouvant aller jusque -Vseff².cos30°/(Znom*√2/2)+Psnom = Psnom/2. Ouch!

Ca veut dire que, quand on dimensionne un ampli pour des enceintes correctement conçues, il faut prendre de la marge :

  • sur le jus qu'il peut sortir = supporter 6Ω pour enceintes 8Ω nominal, 4Ω pour 6Ω nominal. Et bonne chance pour du supporter du 4Ω nominal!...
  • Limiter la tension d'alim en conséquence, pour que les protections thermiques de l'ampli ne viennent pas raboter la sortie (ou, pire, que des composants claquent)

Et si ce sont des enceintes -forcément très chères- dont on dit pudiquement "qu'elles sont difficiles à driver", alors làje vous souhaite bien du plaisir...

On va voir dans la section qui suit qu'un signal de sortie carré est plus contraignant sur la puissance dissipée qu'un sinus. 😜

...et sur signal carré?

Considérons maintenant le même ampli classe B push-pull, mais cette fois-ci avec en sortie un signal carré sur charge résistive.
Pourquoi donc sur charge résistive pure? Parce que sinon le calcul devient complexe (ah-ah-ah), sans apporter grand chose de réel (hi-hi-hi).

Puissance dissipée par l'ampli :
PdissB,sqr = Vdd.Isms,sqr - Ps = Vdd.Vseff/R - Vseff²/R
On se raccorde a la formulation du cas sortie sinus en réécrivant sous la forme :
PdissB,sqr = (ksqr.Vdd - Vseff).Vseff/R
avec ksqr = 1

La puissance dissipée s'avère être une courbe parabolique de Vseff, comme pour la sortie sinus. Par contre, cette courbe sera plus haute que le cas sortie sinus de même tension efficace.

Tiens, un truc contre-intuitif : à tension crête égale, le signal carré ne génère pas toujours des pertes supérieures au signal sinus. Démonstration :
PdissB,sqr < PdissB,sin ⇔ Vdd < (Pssqr-Pssin) / (Isms,sqr-Isms,sin)
⇔ Vdd < (Vsp²/R - Vsp²/2R) / (Vsp/R-2/π.Vsp/R) = Vsp/2(1-2/π)
⇔ Vsp > 2(1-2/π) Vdd ~ 0.727 Vdd
Pour autant, vous pourrez déduire plus loin que le max de la puissance dissipée par l'ampli se situe avant ce seuil, tant pour la sortie sinus que pour la sortie créneau.

On généralise!

On se place dans le cas d'une charge résistive pure R, et on définit le "facteur de forme du signal redressé" suivant :
k = Isms * R / Vseff = Vsms / Vseff
Par extension du théoreme de l'inégalité des moyennes généralisées, on aura la propriété k≤1. Le cas limite k=1 sera atteint pour un signal créneau quasi-quelconque (à moyenne nulle et au moins pseudo-périodique, quand même).

Puissance dissipée par l'ampli :
PdissB = Vdd.Isms - Ps = (k.Vdd - Vseff).Vseff/R
Comme quoi, ce sera toujours une courbe parabolique. Son maximum est atteint lorsque :
∂Pdiss/∂Vseff  = 0
⇔  -Vseff + (k.Vdd - Vseff) = 0
⇔  Vseff@max(PdissB) = k.Vdd/2
Et dans cette situation :
max(PdissB) = k².Vdd²/4R

Petite respiration... AUUUUUMMMMMmmmmm.... Souvenez-vous...
Souvenez-vous, en préambule, nous avions retourné la formule Pdiss=f(Vdd). Reprenons ce bout (de chou?) :
VddB = (Ps+PdissB)/Isms = (Vseff²/R + PdissB)*R/Vseff/k = (Vseff + PdissB*R/Vseff)/k
La forme générale sera toujours une courbe hyperbolique.

On va ben faire comm' qu'on avait dit dans l'présambulle. Ahem... Appliquons maintenant l'idée sous-jacente du préambule : c'est en particulier vrai pour le maximum absolu de puissance dissipable par l'ampli. C'est la courbe du cas Pdiss=Pdissabs :
Vddabs,B = (Vseff +Pdissabs.R/Vseff)/k
Vu la tête de nos courbes ci-dessus, clairement, il faut éviter que tout s'emballe thermiquement quand Vseff monte au-dela du seuil k.Vdd/2! Autrement dit, mieux vaut que la tension d'alim ne dépasse pas le point bas de la courbe quand le niveau sonore commence a être élevé.

Ce point bas coincide évidemment avec le maximum de puissance dissipée qu'on a calculé juste avant. Hi hi hi, ca nous permet de jouer d'aschtuce et obtenir sans calcul supplémentaire :
Pdissabs = k².Vddabs,B²/4R ⇔ Vddabs,B = 2/k.√(Pdissabs.R)

Cette limite haute existe toujours. Mais ce n’est pas forcément la seule limite haute de la zone de fonctionnement sûre (safe operating area ou SOA), que le circuit soit intégré ou en composants discrets :  phénomènes de claquage secondaire des transistors bipolaires, d'emballement thermique des MOSFET, tension inverse subie par l’étage au repos…

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Voili voilou... Bon, honnêtement, exprimer les contraintes principales pour l'alim et la dissipation thermique d'un ampli classe B idéal, c'est pas tant compliqué. Faut juste se poser un peu et écrire les choses proprement. Ca nous permet aussi de poser la démarche avant d'attaquer le vrai truc qui nous intéresse : les formules correspondantes de l'ampli classe AB.

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